Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/105

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
95
LES DERNIERS QUATUORS

joyeuse bonhomie est sans feinte. Et les esquisses[1] accentuaient sa « Freude ». Elle est signée :

[partition à transcrire]

Qui ne reconnaît la ronde de la Joie, dans le finale de la Neuvième Symphonie ? Elle suit Beethoven, à chacun de ses pas, dans ce quatuor. Il en marche enveloppé. Il lui faut faire effort pour la démarquer.

C’est un motif populaire, qui d’abord tourne sur place, avec une bonhomie rustique, on dirait un carillon lointain (le premier violon joue piano, sur la quatrième corde), les échos en ont pu venir jusqu’à Bizet. Puis, la ronde s’anime, et Beethoven a beau refouler les ressouvenirs de la Neuvième, ici et là, ses élans brisent la barrière (mes. 30 et suiv.). À la 55e mesure, la gaieté est débridée, de petites notes fouettent le martellement de la mesure par les sf. ; les bonds burlesques p. f. qui mettent l’accent sur les temps faibles, et qui s’arrêtent au milieu de la mesure, pour recommencer, aboutissent à un trépignement bouffon ff., qu’il me serait difficile de nommer « héroïque », comme font les principaux commentateurs, mais où je reconnais volontiers les éclats de sauvagerie burlesque auxquels se livre Beethoven, quand il est « ausgeknöpft » (déboutonné) (mes. 73 et suiv.). Les brutalités harmoniques sont comme des bourrades de rustres en gaieté. Mais la nature de Beethoven, riche en contrastes, leur fait

  1. Nottebolun, II, p. 546.