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LES DERNIERS QUATUORS

dernier morceau. Aucune trace, bien entendu, de l’adagio-canzone, ni du second morceau (l’allegro ma non tanto, en scherzo) sous sa forme actuelle.

Le pivot de l’œuvre, c’est donc, dès l’origine, le premier et le dernier morceaux, — le premier, avec son mystérieux motif d’introduction, comme une sombre étoile au front,

— le dernier, qui semble entraîné dans le sillage impérieux du premier[1].

Cette liaison de l’allegro appassionato final au morceau initial était si essentielle à la conception du quatuor, que même dans les cahiers qui suivent la maladie et qui voient fleurir la canzone di ringraziamento, la pensée de l’allegro final revient, avant la première esquisse de l’adagio[2].

Cet adagio même ne s’installera dans l’esprit du « convalescent » (« genesenden ») que pas à pas : d’abord, simple mélodie d’andante, dans un style Mozartien, après quelques pages, elle devient choral, mais sans rompre avec la tonalité ordinaire ; et voici que, quelques pages encore après, par le hasard d’une cadence laissée en suspens, l’oreille et l’esprit de Beethoven sont attirés vers le style d’église et les modes antiques. Presque en même temps, un jet de vie renouvelée,

  1. Les esquisses du finale (p. 49 du cahier Nottebohm) s’intercalent dans celles du premier morceau. Une des esquisses paraît même établir une transition qui soude le dernier morceau au premier. — Toutefois, quelques lambeaux d’autres esquisses : une marcia serioso pathet., et une sorte de scherzo bondissant, intitulé 3e Stück, se rapportent à des parties intermédiaires, mais sans aucune ressemblance avec celles qui furent plus tard composées.
  2. Dès la page 5 du Cahier italien, qui contient le premier dessin d’une mélodie pour le morceau lent, — bien éloignée encore de l’esprit de celle du futur choral. Et, dans le Cahier russe, dès la première page, où s’ébauche l’introduction du choral.