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Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/244

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BEETHOVEN

quelque chose qui vient de nouveau de me tomber !… » (« Bester, mir ist schon wieder was eingefallen… ») — Et il lui montra des motifs de ce qui devait devenir le quatuor en ut dièze mineur.

Holz, qui, malgré son culte sincère et batailleur pour le génie de Beethoven, le jugeait souvent, d’un esprit superficiel, et qui ne cachait pas son très peu de goût pour les fugues, disait à Beethoven, peut-être pour le flatter (ou pour mettre un terme à sa quatromanie), que son dernier quatuor (en si bémol) était le plus beau des trois. Mais Beethoven lui répondait :

— « Chacun dans son genre ! L’art veut que nous ne restions pas à la même place. Vous connaîtrez (bientôt) un nouveau genre de la conduite des parties ; et quant à l’imagination, Dieu merci ! nous en manquons moins que jamais ![1] »

Remarquons cette affirmation exclusive d’art souverain ! Quelles que soient les préoccupations de sentiment qui alimentent ces derniers quatuors, la préoccupation dominante est celle de l’artiste. Ils sont, en premier lieu, des œuvres d’art, — en second seulement, des Confessions. L’art n’est-il pas, d’ailleurs, pour lui, le plus haut intermédiaire auprès de Dieu, et son messager qui porte aux hommes sa parole ? — Et Dieu lui-même n’est-il pas le grand ménétrier, le maître des sons, l’artiste des artistes ?[2].

L’art au-dessus de tout, et seul ! « Seul, l’art divin ! seule-

  1. « Jedes in seiner Art ! Die Kunst will es von uns, dass wir nicht stehen bleiben. Sie werden eine neue Art der Stimmführung bemerken, und an Phantasie felhts, Gottlob, weniger als je zuvor… »

    Conversation de Holz avec Lenz, reproduite par Thayer.

  2. Voir, à l’Épilogue de « Finita Comedia », la Religion de Beethoven.