Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/303

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j’avoue qu’au fond, j’en eusse été bien aise), mais moi, quand j’ai dit non une fois, crebleu, c’est non ! Et puis, on n’aime pas, quand on est impotent, à se montrer aux gens. La Martine, inlassable, revenait à la charge : harcelante, comme sont les mouches et les femmes. Si elle n’eût tant parlé, je pense que j’aurais cédé. Mais elle y mettait trop d’obstination : si j’avais consenti, elle eût, du matin au soir, trompetté sa victoire. Je l’envoyai promener. Et naturellement, c’est ce que tout le monde fit, hors moi, bien entendu ; on me laissa morfondre au fond de mon grenier. Ne te plains pas, Colas, c’est toi qui l’as voulu !…

Mais la raison, la vraie, pour quoi je m’obstinais, je ne la disais pas. Quand on n’est plus chez soi, quand on est chez les autres, on a peur de gêner, on ne veut rien leur devoir. C’est un mauvais calcul, si l’on veut se faire aimer. La pire des sottises est de se faire oublier… On m’oubliait très bien. On ne me voyait plus ? On ne venait plus me voir. Même Glodie me laissait. Je l’entendais qui riait, en bas ; et dans mon cœur, je riais, en l’entendant ; mais je soupirais aussi : car j’aurais bien voulu savoir pourquoi elle riait… « L’ingrate ! » Je l’accusais, et je pensais qu’à sa place, j’en aurais fait autant… « Amuse-toi, ma belle ! » … Seulement, pour s’occuper, quand on ne peut plus bouger, il faut bien faire un peu le Job, qui peste sur son fumier.

Un jour que sur le mien, maussade, je gisais, Paillard vint. Ma foi, je ne le reçus pas trop bien. Il était là devant moi, assis au pied du lit. Il tenait