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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

genoux, il la taquinait au sujet de son petit cœur, des conquêtes qu’elle faisait, des demandes en mariage qu’il prétendait avoir reçues pour elle ; il les lui énumérait : des bourgeois respectables, tous plus vieux et plus laids les uns que les autres. Elle se récriait d’horreur, avec des éclats de rire, les bras passés autour du cou de son père, la figure blottie contre sa joue. Et il lui demandait quel était l’heureux élu : si c’était M. le procureur de la République, dont la vieille bonne des Jeannin disait qu’il était laid comme les sept péchés capitaux, ou bien le gros notaire. Elle lui donnait de petites tapes pour le faire taire, ou lui fermait la bouche avec ses mains. Il baisait les menottes, et chantait, en la faisant sauter sur ses genoux, la chanson connue :

Que voulez-vous, la belle ?
Est-ce un mari bien laid ?

Elle répondait, en pouffant, et lui nouant