Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/301

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rade anarchiste qui le nargue et tâche de l’ébranler, il crie :

— Ferme ça ! Ou je te fous en bas !… Qu’est-ce que tu veux de moi ? Est-ce que je n’en ai pas assez, déjà, de toute ma charge ? Tu seras bien avancé, idiot, quand tu m’auras prouvé qu’ils nous ont tous trompés, que la patrie, comme le reste, n’est qu’une sinistre blague, qu’on nous a tués pour rien ? À quoi veux-tu que je croie ? Je ne crois plus à la révolution. Je ne crois pas à la religion. Je ne crois pas à l’humanité : (c’est encore plus bête et plus creux que le reste !) Si je n’ai plus la patrie, où veux-tu que je me raccroche ? Je n’ai plus qu’à me faire sauter le caisson !…

Annette comprend Perret. Marc ne le comprendrait pas…

— Qu’il se fasse sauter le caisson !…

La jeunesse n’a pas de pitié pour la misère du faible, qui a besoin, pour vivre, de tricher avec la vie. Marc ne triche point. Et comme sa jeunesse veut vivre, malgré tout, lui et ses camarades, anarchistes, dadaïstes, ils se vengent à présent par la dérision sans mesure et sans frein de tout ce qui existe, par le ridicule poussé jusqu’à l’extravagance, par l’excès de l’absurde ; ils se vengent par la déraison, de l’inanité meurtrière de la raison…

Et voici ce qu’il comprend le moins : — sa