Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/152

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souffrait de l’indifférence qu’Annette lui montrait. Mais il ne lui en voulait pas ; pour la première fois de sa vie, il n’en voulait pas à un autre, du tort qui lui était fait. Il s’en voulait à lui ; il se répétait qu’elle était son bien, naguère, et qu’il l’avait laissé perdre. Il avait froid au cœur. Il allait, cet enfant, poser la tête sur l’oreiller de sa mère, pour mieux penser à elle. Et plus il pensait à elle, plus il sentait la différence entre elle et les autres qu’il aimait.

Il avait essayé de se reprendre à quelques amitiés. Il s’était rapproché de Pitan, il avait voulu lire au fond… Ah ! qu’il était creux, ce fond ! Cette foi, cet héroïsme, ce dévouement de caniche, comme ils manquaient d’accent personnel ! Quelle ombre, quel reflet ! Dès qu’on tâchait de le faire s’expliquer, de serrer de près sa pensée larvaire, on voyait le caniche en arrêt devant des mots brillants : on eût pu l’assommer sur place, il n’eût pas détourné ses yeux en boules de loto… (Inutile d’avertir que Marc était injuste ! Il l’était, de nature. Comme tous ceux pour qui aimer, c’est préférer ! La justice était le cadet de ses soucis.)… Marc n’avait aucun goût pour les esclaves des mots. Ce petit Diogène était