Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/78

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disait sa joie tranquille, la paix dont il jouissait : on eût dit que sa prison fût la retraite élue pour le sage, un ermitage laïque octroyé au penseur par la grâce de l’État. Par la fenêtre de la cellule, haut placée et grillée, le vent avait apporté des berges de la Seine une fleur de marronnier ; et c’était avec elle tout le printemps qui était entré : Pitan se faisait bucolique. La fleur était là, soigneusement étalée entre les feuilles de la lettre que le juge tenait. Et les deux Parisiens, échangeant un sourire amusé, disaient :

— Le bonhomme, aussi, serait à épingler.

Mais le bonhomme, pas plus que le fougueux adolescent, n’avaient trahi le fond de leur pensée : celui-ci, son inquiétude et ses remords, au sujet de sa mère ; et l’autre, sa volonté de le rassurer ; ils se comprenaient à demi-mot ; et les Parisiens n’y voyaient qu’un dialogue de l’Émile.

Le juge ferma son dossier ; et Franck demanda :

— En résumé ?…

— En résumé, tout se réduit à cette affaire baroque d’évasion. On ne comprend pas très bien quel intérêt y a pu prendre ce vieil Anacharsis. Personnellement, il ne connaissait pas le prisonnier. Nous avons fait filer en Suisse le jeune