Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 5.djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Elle lui jetait un regard noir.

— « Vous le savez. »

— « Peut-être. Mais j’aimerais à te l’entendre dire. »

— « De vous mépriser. »

Il rit durement :

— « J’imaginais que c’était chose faite, depuis longtemps. »

— « Mais au delà de ce que je puis supporter. »

Elle avait les deux poings sous son menton. Elle l’amusait… Tout de même, il eut envie de la gifler. Il se leva, et il marcha, pour faire passer la fantaisie. Il s’arrêta, face à Annette :

— « Je veux donc voir jusqu’où tu peux… La prochaine fois que je ferai la fête, je t’emmènerai. »

— « Non, non, patron, ne faites pas cela !… Je vous, en prie… Ce n’est pas un jeu que l’on peut jouer… Je vous ai parlé sans réflexion, je vous ai blessé, je vous demande pardon… »

Il ricana ; et ils reprirent le travail. Elle pensa qu’il avait oublié. Mais une dizaine de jours après, Timon lui dit :

— « Cette nuit, tu ne rentreras pas chez toi. Je t’emmène à La Garenne, dans mon auto. »

Elle protesta. Il ne voulut rien entendre.

— « Tu n’as personne qui t’attende. Tu es à mes ordres. J’ai besoin de toi. »

Elle lui dit :

— « Patron, c’est grave. Réfléchissez !… Il en peut coûter cher à vous et à moi. »

Il goguenarda :

— « À moi ? »

— « Oui, à vous aussi. Car je suppose que vous n’êtes pas assez bête, pour perdre gratuitement une aide comme moi, dont vous êtes sûr. »

— « Si j’en suis sûr, pourquoi la perdrais-je ?… Et puis, ma fille, si tu te crois irremplaçable, tu t’abuses. »