Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 5.djvu/325

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Par les lettres de la mère, elle reconstituait celles du fils. Elle pénétrait les derniers replis de ce cœur ombrageux, toujours en lutte, ses ressauts de colère contre le monde et contre soi, sa pureté foncière et ses impuretés journalières, qui le faisaient cabrer de dégoût, ses faiblesses et ses défaites, qui le rendaient plus proche d’elle et plus humain… Et la franche intimité avec cette mère, dont la virile compréhension expliquait l’homme à lui-même et le calmait. Elle ressentit une jalousie pour cette femme. — Et ce lui fut le premier signe qu’elle aimait l’homme.

Elle perçut le signe. Rien ne lui échappait de ce que sa nature cherchait, sournoise, à lui voiler. Elle haussa l’épaule et se leva. Debout près du lit, elle considéra le corps étendu, qui se débattait toujours sous l’étreinte. Malgré les soins, le mal ne cédait point, redoublait. Le dénouement fatal menaçait. La main de Assia caressa le front brûlant, puis, s’introduisant sous les draps, serra tendrement les pieds. Elle réfléchit, jeta un regard sur les lettres laissées sur la table. Elle sortit, et télégraphia à la mère.