Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/130

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réparer les accrocs que son esprit faisait au jeu. Et après tout, ce jeu n’était son jeu que pour l’amusement du joueur, non pour la rafle. Qui gagne ou perd, au bout du compte, il s’en fichait ! Il n’eût même pas été fâché, à certains jours, de faire perdre ceux pour le compte de qui il gagnait… « À pile ou face ! Selon qu’il me chante ! »… C’est qu’il était, comme d’ailleurs beaucoup de ses maîtres, les condottieri de la finance impérialiste, un sang-mêlé, avec la mentalité d’un affranchi de l’Empire Romain. Ses racines ne tenaient pas au sol.

Quand Marc commença de jouer du violon de la paix européenne, sa langue de fille se mit à danser. Il s’amusait de l’intrusion désordonnée de cette sauterelle dans le guêpier. Ce pauvre gars qui s’imaginait qu’il travaillait à la paix du monde !

— « La paix, mon bon, elle ne se fait plus, ni dans la presse, ni dans les discours, ni au Forum, ni au Parlement, ni dans les parlottes des ministres, ni dans les conférences des diplomates, ni même sur le front des armées. C’est du passé. C’est démodé ! La paix, la guerre, sont dans les mains de ceux qui tiennent les cordons de la bourse : — une douzaine. « La bourse ou la vie ! » Ils ne t’offrent même plus le choix. Ils le feront pour toi. Ta vie, ta mort, sont dans nos mains, mon cher garçon. Quand nous voudrons ! »

Il n’en fallait pas tant pour faire bondir Marc. Cette fatuité !… Il avait beau la savoir ironique…

— « Quand nous voudrons ?… Quand vous voudrez ? Qui, vous ? Qui ? Toi, la Puce ? Tu ne peux rien. Tu ne veux rien… »

La Sainte-Puce n’était point susceptible. Elle ne voulait rien, pour le moment, qu’agacer Marc. Elle était satisfaite d’avoir réussi.