Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/160

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— « Colombe… »

Elle éclata d’un rire aigu, et elle lui dit :

— « Achève la semaine de Lia, et nous te donnerons aussi l’autre, pour le service que tu nous feras, sept autres années !… »

Son rire, ses yeux, ses dents aiguës, sa longue bouche qui se tordait d’excitation, d’astuce et de plaisir, et par-dessus tout cette buée de terre qui s’ouvre au soleil, ce corps heureux qui, pour la première fois, s’épanouit sous la bouche qu’il convoitait, qu’il a voulue, qu’il a conquise, tournèrent la tête au vaincu. La protestation qu’il tentait vainement de formuler, d’une langue paralysée, comme sa conscience, mourut avant d’être née. Nerveusement, il rit aussi, et empoignant aux reins Lia, une année de plus il la servit…

À ce moment, en sueur, en fièvre, il entendit « l’autre », qui s’arrêtait sur le palier et qui frappait… Et ce fut la foudre qui le frappa ! Du coup d’éclair, il s’éveilla, transpercé ; il arracha le lierre vivant ; il se dressa sur son séant, l’esprit en déroute, atterré… « L’autre » attendait derrière la porte, elle écoutait, elle pouvait voir par la fente la lumière qui, par oubli, brûlait au mur. Il fit la mine d’un gamin pris en faute, qui tâche de nier ; précipitamment il allongea, par-dessus le corps de Bernadette dont les yeux aigus le fouillaient, un bras maladroit pour éteindre ; et dans son trouble, il rata le coup. Cependant que, sur le seuil, la Colombe recommençait, impatiente, à donner du bec contre la porte. Et sous son corps à demi soulevé, il vit la gazza ladra, dont la longue bouche se crispait d’un de ces rires qu’il connaissait. Il fit des yeux épouvantés, pour lui commander le silence. Trop tard !… Le rire aigu partit en vrille, il se déroula, il s’enroula par toute la chambre, et sous la porte et dans le trou de la serrure il allongea ses poinçons. Marc, violem-