Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/520

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Elle avait, là-bas, sa fille Assia. Et ici, près d’elle, ce petit, le fils de son fils. Elle se retrouvait, comme trente ans avant, avec un enfant à couver.

Mais rien ne recommence. Ce n’était plus le même enfant. Elle n’était plus la même femme. Quand on a parcouru trente ans de route avec un fils, et qu’on reprend au commencement, on n’a plus la même fièvre d’attente. On sait où mène le chemin et, comme sur la carte au jeu de l’Oie, les puits, les prisons et les joies qu’on retrouvera échelonnés : il y a toujours le risque des coups de dés ; mais la contrée n’offre plus le trouble de l’inconnu : on l’a battue. — Bien entendu, l’on se trompe 1 Car, dans l’intervalle, le paysage a été modifié par le passage d’une génération. D’autres fondrières se sont ouvertes, et des anciennes ont été comblées. On risque d’être, plus d’une fois, égaré par la fidélité même des souvenirs.

Et puis, il y a ce petit être nouveau, qui a beau être fait avec des morceaux de l’ancien, il est un autre — un autre monde — un autre temps. C’est, en vérité, déconcertant. Il a les mêmes yeux, les mêmes traits. Il vous regarde… Avant même qu’il ait parlé, on sent, on sait qu’un hôte nouveau, une nouvelle ère, sont