Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/94

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il ne saurait jamais la vérité. Assia ne se confesserait pas deux fois.

Sur une feuille, à part de la lettre, qui avait échappé au bûcher, elle demandait qu’on lui envoyât à l’hôtel une liste de linge et d’effets qu’elle énumérait. Elle laissait à Marc l’alternative de lui fixer un jour et l’heure où elle pourrait venir les chercher. Sans doute, y avait-il dans son esprit un vague espoir de le rencontrer. Mais Marc se chargea de le lui arracher. Il frémissait à la pensée qu’elle pourrait remettre les pieds dans son logis. Il se hâta de rassembler dans une malle tous les objets qu’elle réclamait, et il y ajouta, comme un soufflet, tous les portraits qu’il avait d’elle. Il les lui fit porter, le jour même, par un commissionnaire, au nom de Mme Volkov. Lorsque l’envoi lui arriva, le sang remonta au front d’Assia ; elle tira de son sac sa petite trousse, et de cette trousse un instantané d’elle avec Marc qu’ils avaient fait prendre, un heureux jour, et qui ne la quittait jamais : elle le mit en pièces ; que ce fût fini ! — La nuit, ne dormant pas, elle se releva pour rechercher jusque sous son lit, dans les flocons de poussière, les morceaux du puzzle ; mais elle les avait trop bien détruits, impossible de reconstituer l’image ! Elle n’en garda pas moins les morceaux dans une enveloppe, qu’elle cacheta, pour s’enlever la tentation de la rouvrir.

Marc se rendit à la Représentation Commerciale, pour souffleter l’homme qui l’avait sali. Il dut apprendre que le coucou était parti au fond de la forêt ; il lui fallut dévorer seul, des nuits, des nuits, ses pensées de meurtre inassouvies.

Cependant, Annette, que le couple rompu s’obstinait à laisser dans l’ignorance des événements, s’inquiéta de ne plus voir Assia, et elle finit par arracher de son