Page:Rolland - Pierre et Luce.djvu/15

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forces bestiales, aveugles, écrasantes de la vie dont il est la proie, sans avoir demandé à vivre. Et s’il est de nature délicate, de cœur tendre, de corps frêle, comme Pierre, il éprouve un dégoût, une horreur, qu’il n’ose confier aux autres, pour ces brutalités, ces saletés, ces non-sens de la nature féconde et dévorante, — cette truie en gésine, qui mange sa ventrée. — Dans tout adolescent, de seize à dix-huit ans, est un peu de l’âme d’Hamlet. Ne lui demandez pas de comprendre la guerre ! (Bon pour vous, hommes rassis !) Il a bien assez à faire de comprendre la vie et de lui pardonner. D’habitude, il se terre dans le rêve et dans l’art, jusqu’à ce qu’il soit habitué à son incarnation et que la nymphe ait achevé, de la larve à l’insecte, son angoissant passage. Qu’il a