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la vie de Michel-Ange

turel.[1] Les princes s’inclinaient devant sa royauté. François Ier et Catherine de Médicis lui rendaient hommage.[2] Cosme de Médicis voulut le nommer sénateur ;[3] et, quand il vint à Rome,[4] il le traita en égal, le fit asseoir à côté de lui, l’entretint confidentiellement. Le fils de Cosme, don Francesco de Médicis, le reçut, sa barrette à la main, « témoignant d’un respect sans bornes pour un homme aussi rare ».[5] On n’honorait pas moins en lui son génie que « sa grande vertu ».[6] Sa vieillesse fut entourée d’autant de gloire que celle de Goethe ou de Hugo. Mais il était un homme d’un autre métal. Il n’avait ni la soif de popularité de l’un, ni le respect bourgeois de l’autre, — si libre qu’il fût, — pour le monde et pour l’ordre établi. Il méprisait la gloire, il méprisait le monde ; et s’il servait les papes, « c’était par contrainte ». Encore ne cachait-il pas que « même les papes l’ennuyaient et le

  1. Condivi commence ainsi sa Vie de Michel-Ange :

    « Depuis l’heure où le Seigneur Dieu, par sa grâce toute puissante, m’a jugé digne non seulement de voir Michelangelo Buonarroti, le peintre et sculpteur unique, — ce que j’aurais à peine eu l’audace d’espérer, — mais de jouir de ses entretiens, de son affection et de sa confiance, — en reconnaissance d’un tel bienfait, j’ai entrepris de réunir tout ce qui me paraît dans sa vie digne de louange et d’admiration, pour être utile aux autres par l’exemple d’un tel homme. »

  2. François premier, en 1546 ; Catherine de Médicis, en 1559. Elle lui écrivit de Blois, « sachant, avec le monde entier, combien il était supérieur à n’importe qui dans ce siècle », pour le prier de sculpter la statue équestre de Henri II, ou du moins, d’en faire le dessin. (14 novembre 1559)
  3. En 1552. Michel-Ange ne répondit pas : — ce qui blessa le duc. — Quand Benvenuto Cellini en reparla à Michel-Ange, celui-ci répondit d’une façon sarcastique.
  4. En novembre 1560.
  5. En octobre 1561.
  6. Vasari. (À propos de la réception que Cosme fit à Michel-Ange)
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