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Francesco Berni ;[1] il correspondait avec Benedetto Varchi ; il échangeait des poésies avec Luigi del Riccio et avec Donato Giannotti. On recherchait sa conversation, ses aperçus profonds sur l’art, ses remarques sur Dante, que personne ne connaissait comme lui. Une dame romaine[2] écrivait qu’il était, quand il voulait, « un gentilhomme de manières fines et séduisantes, et tel qu’il existait à peine son pareil en Europe ». Les dialogues de Giannotti et de François de Hollande montrent sa politesse exquise et l’habitude qu’il avait du monde. On voit même, par certaines de ses lettres aux princes,[3] qu’il lui eût été facile d’être un parfait courtisan. Le monde ne l’a jamais fui : c’est lui qui le tint à distance ; il ne dépendit que de lui de mener une vie triomphale. Il était pour l’Italie l’incarnation de son génie. À la fin de sa carrière, dernier survivant de la grande Renaissance, il la personnifiait, il était à lui seul tout un siècle de gloire. Ce n’étaient pas seulement les artistes qui le regardaient comme un être surna-

    sincère pour feindre d’aimer ce qu’il n’aimait point. — Cependant, il se montra fort courtois pour Titien, lors de sa visite à Rome, en 1545. — Mais à la société des artistes, dont la culture, en général, laissait à désirer, il préférait celle des écrivains et des hommes d’action.

  1. Ils échangèrent des épîtres en vers, amicales et burlesques. (Poésies, LVII et CLXXII) Berni fit de Michel-Ange un éloge magnifique, dans son Capitolo a fra Sebastiano del Piombo. Il dit « qu’il était l’Idée en soi de la sculpture et de l’architecture, comme Astrée était l’Idée de la justice, qui était toute bonté et toute intelligence ». Il l’appela un second Platon ; et, s’adressant aux autres poètes, il leur dit ce mot admirable, souvent cité : « Silence à vous, instruments harmonieux ! Vous dites des mots, lui seul dit des choses. »

    Ei dice cose, et voi dite parole…

  2. Dona Argentina Malaspina, en 1516.
  3. Surtout sa lettre à François premier, le 26 avril 1546.
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