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la vie de Michel-Ange

ne cessa, toute sa vie, de combler de ses libéralités les malheureux, connus et inconnus. Non seulement il témoigna toujours la plus touchante affection pour ses vieux serviteurs et pour ceux de son père, — pour une certaine Mona Margherita, qu’il recueillit après la mort du vieux Buonarroti, et dont la mort lui causa « plus de peine que si c’était une sœur »,[1] — pour un humble menuisier, qui avait travaillé à l’échafaudage de la Chapelle Sixtine, et dont il dota la fille…[2] Mais il donnait constamment aux pauvres, surtout aux pauvres honteux. Il aimait à associer à ces aumônes son neveu et sa nièce, à leur en inspirer le goût, à les faire accomplir par eux, sans le nommer lui-même : car il voulait que sa charité demeurât secrète.[3] « Il aimait mieux

    il ne tenait aucun compte ; il ne savait pas ce qu’il avait, et il donnait à pleines mains. Sa famille ne cessa de puiser dans son capital. Il faisait des présents royaux à ses amis, à ses serviteurs. La plupart de ses œuvres ont été données, non vendues ; il travailla gratuitement à Saint-Pierre. Personne ne condamna plus sévèrement que lui l’amour de l’argent : — « L’avidité au gain est un très grand péché », écrit-il à son frère Buonarroto. — Vasari proteste avec indignation contre les calomnies des ennemis de Michel-Ange. Il rappelle tout ce que son maître a donné : — à Tommaso dei Cavalieri, à Bindo Altoviti, à Sebastiano del Piombo, à Gherardo Perini, des dessins sans prix ; à Antonio Mini, la Léda, avec tous les cartons et tous les modèles ; à Bartolommeo Bettini, une admirable Vénus avec Cupidon qui la baise ; au marquis del Vasto, un Noli me tangere ; à Roberto Strozzi, les deux Esclaves ; à son serviteur Antonio, la Déposition de Croix, etc. — « Je ne sais pas, conclut-il, comment on peut traiter d’avare cet homme qui faisait largesse de telles œuvres, valant des milliers d’écus. »

  1. Lettres à Giovan Simone (1533), — à Lionardo Buonarroti. (Novembre 1540)
  2. Vasari.
  3. « Il me semble que tu négliges trop l’aumône », écrit-il à Lionardo (1547).

    « Tu m’écris que tu veux donner à cette femme quatre écus d’or, pour l’amour de Dieu : cela me plaît. » (Août 1547)

    « Fais attention à donner là où il y a un vrai besoin, et à ne pas

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