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LE DÉSESPOIR

de Florence. En juin, il alla inspecter la citadelle de Pise, et les bastions d’Arezzo et de Livourne. En juillet et en août, il fut envoyé à Ferrare, pour y examiner les fameux ouvrages de défense, et conférer avec le duc, grand connaisseur en fortifications.

Michel-Ange reconnut que le point le plus important de la défense de Florence était la colline de San Miniato ; il décida d’assurer cette position par des bastions. Mais, — on ne sait pourquoi, — il se heurta à l’opposition du gonfalonier Capponi, qui chercha à l’éloigner de Florence.[1] Michel-Ange, soupçonnant Capponi et le parti des Médicis de vouloir se débarrasser de lui, pour empêcher la défense de la ville, s’installa à San Miniato et n’en bougea plus. Mais sa défiance maladive accueillait tous les bruits de trahison qui circulent toujours dans une ville assiégée, et qui, cette fois, n’étaient que trop fondés. Capponi, suspect, avait été remplacé comme gonfalonier par Francesco Carducci ; mais on avait nommé condottiere et gouverneur général des troupes florentines l’inquiétant Malatesta Baglioni, qui devait plus tard livrer la ville au pape. Michel-Ange pressentait le crime. Il fit part de ses craintes à la Seigneurie. « Le gonfalonier Carducci, au lieu de le remercier, le réprimanda injurieusement ; il lui reprocha d’être toujours soupçonneux et peureux. »[2] Malatesta apprit la dénonciation de Michel-Ange : un homme de sa trempe ne reculait devant rien, pour écarter un adversaire dangereux ; et il était tout puis-

  1. Busini, d’après les confidences de Michel-Ange.
  2. Condivi. — « Et certes, ajoute Condivi, il eût mieux fait d’ouvrir l’oreille au bon conseil ; car lorsque les Médicis rentrèrent, il fut décapité. »
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