Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/171

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feu. C’est qu’il continuait à le craindre. Il regardait de loin jaillir les étincelles ; les questions qu’il se posait demeuraient obscures et pleines de contradictions. Cependant, à chaque fois, il se rassurait davantage. Puis le langage articulé et celui des gestes vinrent à son aide. Car il commençait à mieux comprendre les Wah : il avait appris le sens de dix ou douze mots et celui d’une trentaine de signes particuliers à la race. Il soupçonna d’abord que les Wah n’enfermaient pas le feu dans les pierres, mais qu’il y était naturellement. Il jaillissait avec le choc et se jetait sur les brins d’herbe sèches : comme il était alors très faible, il ne saisissait pas tout de suite sa proie. Naoh se rassura plus encore quand il vit tirer les étincelles de cailloux qui gisaient sur la terre. Dès qu’il fut certain que le secret se rapportait aux choses plus encore qu’au pouvoir des Wah, ses dernières méfiances se dissipèrent. Il apprit aussi qu’il fallait deux pierres de sorte différente : la pierre de silex et la marcassite. Et, ayant lui-même fait bondir les petites flammes, il essaya d’allumer un foyer. La force et la vitesse de ses mains aidèrent à son inexpérience : il produisait beaucoup de feu. Mais, pendant bien des haltes, il ne put réussir à faire brûler la plus faible feuille de gramen.

Un jour, la horde s’arrêta avant le crépuscule. C’était à la pointe d’un lac aux eaux vertes, sur une terre sableuse, par un temps extraordinairement sec. On voyait dans le firmament un vol de grues ; des sarcelles fuyaient parmi les roseaux ; au loin rugissait un lion. Les Wah allumèrent deux grands feux ; Naoh, s’étant procuré des brindilles très minces et presque carbonisées, frappait ses pierres l’une contre l’autre. Il travaillait avec une passion violente. Puis des doutes le prirent ; il se dit que les Wah cachaient encore un secret. Près de s’ar-