Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/193

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le chef. S’ils regardent, ils reconnaîtront Naoh, Nam et Gaw ! Ils savent qu’ils seront les bienvenus.

Tous trois, debout devant le feu rouge, montrent des silhouettes aussi visibles qu’en plein jour et poussent le cri d’appel des Oulhamr.

L’attente. Elle mord le cœur des compagnons ; elle est grosse de toutes les choses terribles. Et Naoh gronde :

— Ce sont des ennemis !

Nam et Gaw le savent bien et toute joie les quitte. Le péril est plus dur, qui les frappe dans cette nuit où le retour semblait si proche. Il est plus équivoque aussi, puisqu’il vient des hommes. Sur ce sol voisin du grand marécage, ils ne pressentaient d’autre approche que celle de leur horde. Est-ce que les vainqueurs de Faouhm l’ont attaqué encore ? Les Oulhamr ont-ils disparu du monde ?

Naoh voit Gammla conquise ou morte. Il grince des mâchoires et sa massue menace l’autre rive. Puis, accablé, il s’accroupit devant le bûcher, il songe, il guette…

Le ciel s’est ouvert à l’orient, la lune à son dernier quartier apparaît au fond de la savane. Elle est rouge et fumeuse, énorme ; sa lueur est faible encore, mais elle fouille les profondeurs du site : la fuite que médite le chef deviendra presque impossible si les hommes cachés sont en nombre et s’ils ont dressé des embuscades.

Tandis qu’il y pense, un grand frémissement le secoue. À l’aval, il vient d’apercevoir une silhouette trapue. Si rapidement qu’elle ait disparu dans les roseaux, la certitude le pénètre comme la pointe d’un harpon. Ceux qui se cachent sont bien des Oulhamr : mais Naoh préférerait les Dévoreurs d’Hommes ou les Nains Rouges. Car il vient de reconnaître Aghoo-le-Velu.