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CONTES. — PREMIÈRE SÉRIE

tombait des uhlans et des fantassins aux abords des villages. Les officiers allemands ne décoléraient plus ; on vous fusillait les suspects avec un minimum de scrupules et de formes. Le père de Charval était un ancien soldat que de graves blessures avaient rendu à demi impotent. Il avait, bien entendu, le cœur plein de la haine qui emplissait à cette époque tout cœur français ; toutefois, il eût été, par principe, par tempérament aussi (étant de nature soumis et « hiérarchique » ), il eût été, dis-je, incapable de commettre un acte de guerre irrégulier. Aussi se contentait-il de souhaiter que l’état de ses membres lui permit de se rengager, mais ce faisant, il observait une attitude correcte vis-à-vis de l’ennemi. En ce monde, il ne suffit pas de ne rien faire pour échapper à la Némésis ! Ce pauvre Charval était marqué du signe des malchanceux.

Un matin qu’il se promenait au bois, des coups de feu retentirent. Charval, qui approchait en cet instant de l’orée, vit deux soldats prussiens s’abattre tandis que des francs-tireurs s’enfuyaient prestement à travers la futaie : leur embuscade, n’était pas à un jet de pierre de l’endroit où se trouvait notre promeneur et où il fut cueilli par deux énormes soldats poméraniens. Traîné devant