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LA MORT DE LA TERRE

rouge, de limonite ou de fer spathique, revêtues de bismuth, nous nous croyons inexpugnables. Mais si quelque révolution improbable ramenait l’eau près de la surface, le nouveau règne opposerait des obstacles incalculables au développement humain, du moins à un développement de quelque envergure.

Targ jeta un long regard sur la plaine : partout il apercevait la teinte violette et les formes sinusoïdales particulières aux agglomérats ferromagnétiques.

— Oui, murmurait-il…, si l’humanité reprenait quelque envergure, il faudrait recommencer le travail des ancêtres. Il faudrait détruire l’ennemi ou l’utiliser. Je crains que sa destruction ne soit impossible : un nouveau règne doit porter en soi des éléments de succès qui défient les prévisions et les énergies d’un règne vieilli. Au rebours, pourquoi ne trouverait-on pas une méthode qui permettrait aux deux règnes de coexister, de s’entraider même ? Oui, pourquoi pas ?… puisque le monde ferromagnétique tire son origine de notre industrie ? N’y a-t-il pas là l’indice d’une compatibilité profonde ?

Puis, portant ses yeux vers les grands pics de l’Occident :

— Hélas ! mes rêves sont ridicules. Et pourtant…, pourtant ! Ne m’aident-ils pas à vivre ?… Ne me donnent-ils pas un peu de ce jeune bonheur qui a fui pour toujours l’âme des hommes ?