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Page:Rosny aîné - Les astronautes - 1960.djvu/126

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LES NAVIGATEURS DE L’INFINI

Pendant une dizaine de jours, nous dûmes pourtant subir l’indiscrétion des curieux et des informateurs.

Grâce et le Chef Implicite, après l’effarement du début, supportèrent sans trop d’ennui l’importunité des Terrestres. Même, ne voyant que bienveillance chez les visiteurs et les badauds, ils y trouvaient un certain agrément.

Bientôt, cependant, les curiosités s’apaisèrent et nous eûmes des jours entiers sans visiteur. Je faisais avec Jean, Grâce, Violaine et le Chef Implicite des excursions tantôt terrestres, tantôt aériennes. Parfois, l’aquaplaneur descendait sur le fleuve, la rivière ou le lac et c’est peut-être ce que préféraient Grâce et Violaine.

« Il me semble, disait Grâce, être revenue dans une existence très ancienne dont le souvenir est pareil à un rêve…

— Même pour nous, répondait Violaine, les cieux évoquent des temps disparus dans la nuit préhistorique.

— Et Dieu sépara les Eaux inférieures des Eaux supérieures ! » psalmodiait Jean.

Nous constations chez nos hôtes une singulière évolution de la sensibilité. L’inertie résignée caractéristique des Martiens, leur apathie d’êtres qui acceptent leur dégénérescence, décroissait de jour en jour… Le Chef Implicite, si placide, se montrait chaque jour plus enclin à des émotions vives. Il le savait :

« Même dans mon enfance, disait-il, je n’ai pas été aussi jeune que je le suis maintenant. »