Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/202

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Ah ! Pourquoi falloit-il que le sang des mortels ;
Pour honorer Hésus, coulât sur les autels ?
Qu’il soit béni le dieu, dont le bras secourable
A purgé nos climats de ce culte exécrable !
Mais en ouvrant ton sein à de plus douces loix,
Ô France ! Tu devois hériter des gaulois
Un peu de leur respect pour leurs temples agrestes.
Trop oublieux d’un sang, dont nous sommes les restes,
Nous avons abbattu sous nos coups imprudens
Des bois, que pleureront nos derniers descendans.
Où trouver en effet des chênes, dont la tête
Ait bravé deux cens ans l’effort de la tempête ?
Nos forêts n’offrent plus qu’un aride coup-d’oeil ;
Et Compiegne et Crécy gémissent sous le deuil.
Lieux chéris des neuf soeurs, délicieuse enceinte,
Où long-tems de Budé s’égara l’ombre sainte ;
Fontaine, à qui le nom de cet homme fameux
Sembloit promettre, hélas ! Un destin plus heureux,
J’ai vu, sous le tranchant de la hâche acérée,
J’ai vu périr l’honneur de ta rive sacrée !
Tes chênes sont tombés, tes ormeaux ne sont plus !