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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/204

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J’ose à peine écouter ses sifflemens terribles,
Par le calme des nuits devenus plus horribles.
Quel fracas ! Quel tumulte ! à ses coups redoublés,
Mes champêtres lambris gémissent ébranlés.
Ennemi du sommeil dont l’aîle me protège,
Il agite ma couche ; et son fougueux cortège,
L’eurus et les autans, par un commun assaut
Me battant à grand bruit, m’éveillent en sursaut.
Mon ame, trop long-tems de préjugés nourrie,
Croit entendre les morts : je pâlis, je m’écrie,
J’appelle ma raison contre ma folle erreur ;
Et je parviens à peine à dompter ma terreur.
Nuit sombre : mais quel jour plus sombre lui succède !
Qu’il est foible, incertain ! Quelle vapeur l’obsède !
Froide et contagieuse, elle monte en flottant,
Et comme un fleuve impur s’épaissit et s’étend.
Je ne vois plus des monts l’inégale surface ;
Plaines, fleuves, cités, tout s’éteint, tout s’efface.
Je ressemble au mortel, qui loin du jour languit
Dans ces cachots, voisins de l’éternelle nuit.
Mon front est sans couleur, ma tête est affaissée ;