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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/206

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Ah ! Plaignons le mortel, qui, dans ce triste jour,
Contraint de s’avancer vers un lointain séjour,
Ne reconnoissant plus ni côteau, ni prairie,
Traîne un pas égaré sur la nège qui crie.
Ses piés en vains efforts consument leur vigueur.
Haletant, il s’arrête ; et vaincu de langueur,
Maudit une contrée, où le regard n’embrasse
Qu’un informe désert sans hospice et sans trace.
Bientôt le jour plus foible ajoute à ses ennuis :
L’ombre fond sur la terre, et la reine des nuits
A voilé son croissant de nuages funèbres.
Que fera-t-il alors perdu dans les ténèbres,
Craignant à chaque pas et les marais trompeurs
Et les étangs couverts d’un amas de vapeurs ?
Le coeur serré d’angoisse, il s’étend sur la plaine ;
Là, sans couleur, sans force et presque sans haleine,
Il murmure tout bas, dans un long désespoir,
Le tendre nom d’un fils qu’il ne doit plus revoir.
Mais c’en est fait. Déjà ses esprits s’engourdissent ;
Son sang ne coule plus ; ses membres se roidissent ;
Ses yeux las de s’ouvrir se ferment ; il s’endort :
Invincible sommeil qui s’unit à la mort.