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surtout par la richesse des mots qui expriment quelque objet vivant ou inanimé de la création. La lune, c’est aché-ninak (le soleil de la nuit). — Le vin, c’est oké panké (l’eau de raisin) ; un bateau à vapeur, c’est pini louak (le pirogue de feu).

Leur idiome est aussi très-riche en onomatopées. Si un sauvage s’écrie : Tchalacla, vous levez instinctivement la tête : il semble entendre un cri d’oies voyageuses qui passent. S’il dit : bisoco, vous reconnaissez le cri de la grive.

J’ai souvent fait interroger ces Indiens pour avoir une idée précise de leurs croyances religieuses. Ils croient à l’existence du Sta-houllou (du Grand-Être) ; mais quant à l’immortalité de l’âme, ils n’en ont aucune idée. Un d’eux, qui avait un grand bon sens naturel et à qui je faisais demander un jour ce qu’il pensait devenir après la mort, répondit, après quelques instans de réflexion : « Toi, qui vois tant de choses sur ce papier noirci (et en parlant ainsi il regardait un livre que je tenais à la main), tu iras peut-être là-haut (et il montrait du doigt le ciel), mais nous… hillé taa, quand nous sommes morts, tout est fini. »

Cependant, ils croient aux revenans. Ils respectent la cendre des morts. Un d’eux, à qui je proposais de me procurer un crâne du Sauvage, n’y voulut jamais consentir. « Le mort, disait-il, viendrait me tourmenter pendant mon sommeil. Il a besoin de sa tête. Ne la lui prenons pas. »

Ils sont excessivement paresseux et on ne peut plus amateurs du far niente et de la siesta. Quand on leur demande pourquoi ils ne travaillent pas, ils répondent : « Sommes-nous