Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t11.djvu/267

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Voyant l’indignation dont il s’enflammoit à ces idées, je gardai de lui parler de tous ces fatras de livres & de brochures qu’on lui fait barbouiller & publier tous les jours avec autant de secret que de bon sens. Par quelle inconcevable bêtise pourvoir-il espérer, surveille comme il est, de pouvoir garder un seul moment l’anonyme, & lui à qui l’on reproche tant de se défier à tort de tout le monde, comment auroit-il une confiance aussi stupide en ceux qu’il chargeroit de la publication de ses manuscrits, & s’il avoir en quelqu’un cette inepte confiance, est-il croyable qu’il ne s’en serviroit, dans la position terrible ou il est, que pour publier traductions & de frivoles brochures ?*

[*Aujourd’hui ce sont des livres en forme : mais il y a dans l’œuvre qui me regarde un progrès qu’il n’étoit pas aise de prévoir.] Enfin peut-on penser que se voyant ainsi journellement découvert, il ne laissât pas d’aller toujours son train avec le même mystère, avec le même secret si bien garde, soit en continuant de se confier aux mêmes traitées, soit en choisissant de nouveau confidens tout aussi fidelles ?

J’entends insister. Pourquoi sans reprendre ce métier d’auteur qui lui déplaît tant, ne pas choisir au moins pour ressource quelque talent plus honorable ou plus lucratif ? Au lieu de copier de la musique, s’il étoit vrai qu’il la fut, que n’en faisoit-il ou que ne l’enseignoit-il ? S’il ne la savoit pas, il avoir ou passoit pour avoir d’autres connoissances dont il pouvoir donner leçon. L’italien, la géographie, l’arithmétique, que sais-je moi ! Tout, puisqu’on a tant de facilites à Paris pour enseigner ce qu’on ne sait pas soi-même ; les plus médiocres