Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/555

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changea bientôt avec si peu de mesure qu’il ne daignoit pas même dans leur propre maison me dire un seul mot, ni me rendre le salut, ni aucun des devoirs que l’on rend chez soi aux étrangers. Rien cependant n’étoit survenu de nouveau que l’arrivée de J. J. Rousseau & de David Hume ; & certainement la cause de ces changemens ne vint pas de moi ; à moins que trop de simplicité, de discrétion de modestie ne soit un moyen de mécontenter les Anglois.

Pour M. Hume, loin de prendre avec moi un ton révoltant, il donnoit dans l’autre extrême. Les flagorneries m’ont toujours été suspectes. Il m’en a fait de toutes les façons *

[*J’en dirai seulement une qui m’a fait rire ; c’étoit de faire ensorte, quand je venois le voir, que je trouvasse toujours sur sa table un tome de l’Héloïse ; comme si je ne connoissois pas assez le goût de M. Hume, pour être assuré que, de tous les livres qui existent, l’Héloïse doit être pour lui le plus ennuyeux.] au point de me forcer, n’y pouvant tenir davantage, à lui en dire mon sentiment. Sa conduite le dispensoit fort de s’étendre en paroles ; cependant, puisqu’il en vouloir dire, j’aurois voulu qu’à toutes ces louanges fades il eût substitué quelquefois la voix d’un ami ; mais je n’ai jamais trouvé dans son langage rien qui sentît la vraie amitié, pas même dans la façon dont il parloit de moi à d’autres en ma présence. On eût dit qu’en voulant me faire des Patrons il cherchoit à m’ôter leur bienveillance, qu’il vouloir plutôt que j’en fusse assisté qu’aimé ; & j’ai quelquefois été surpris du tour révoltant qu’il donnoit à ma conduite près des gens qui pouvoient s’en offenser. Un exemple éclaircira ceci. M. Penneck du Musaeum, ami de Mylord Maréchal &