Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/604

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qu’il vous plaît de me faire ; mais il faut tout vous dire, sans les refuser je n’en ferai pas plus reconnoissant que si vous ne m’en faillez aucun. Je vous suis attaché, Monsieur, & je bénis le Ciel, dans mes miseres, de la consolation qu’il m’a ménagée, en me donnant un voisin tel que vous : mon cœur est plein de l’intérêt que vous voulez bien prendre à moi, de vos attentions, de vos soins, de vos bontés, mais non pas de vos dons ; c’est peine perdue, je vous assure ; ils n’ajoutent rien à mes sentimens pour vous ; je ne vous en aimerai pas moins, & je serai beaucoup plus à mon aise si vous voulez bien les supprimer désormais.

Vous voilà bien averti, Monsieur ; vous lavez comment je pense, & je vous ai parlé très-sérieusement. Du reste, votre volonté soit faite & non pas la mienne ; vous serez toujours le maître d’en user comme il vous plaira.

Le tems est bien froid pour se mettre en route. Cependant si vous êtes absolument résolu de partir, recevez tous mes souhaits pour votre bon voyage, & pour votre prompt & heureux retour. Quand vous verrez Mad. la Duchesse de Portland, faites-lui ma cour, je vous supplie ; rassurez-la sur l’état de Mylord Maréchal. Cependant, comme je ne serai parfaitement rassuré moi-même que quand j’aurai de ses nouvelles, si-tôt que j’en aurai reçu j’aurai l’honneur d’en faire part à Mad. la Duchesse. Adieu, Monsieur, derechef, bon voyage, & souvenez-vous quelquefois du pauvre hermite votre voisin.

Vous verrez sans doute votre aimable niece. Je vous prie de lui parler quelquefois du captif qu’elle a mis dans ses chaînes, & qui s’honore de les porter.