Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t5.djvu/428

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Enfin il peut concentrer tout le gouvernement entre les mains d’un magistrat unique. Cette troisième forme est la plus commune, & s’appelle monarchie ou gouvernement royal.

Nous remarquerons que toutes ces formes, ou du moins les deux premières, sont susceptibles de plus & de moins, & ont même une assez grande latitude. Car la démocratie peut embrasser tout le peuple ou se resserrer jusqu’à la moitié. L’aristocratie, à son tour, peut de la moitié du peuple se resserrer indéterminément jusqu’aux plus petits nombres. La royauté même admet quelquefois un partage, soit entre le père & le fils, soit entre deux frères, soit autrement. Il y avoit toujours deux rois à Sparte, & l’on a vu dans l’empire romain jusqu’à huit empereurs à la fois, sans qu’on pût dire que l’empire fût divisé. Il y a un point où chaque forme de gouvernement se confond avec la suivante ; &, sous trois dénominations spécifiques, le gouvernement est réellement capable d’autant de formes que l’Etat a de citoyens.

Il y a plus : chacun de ces gouvernements pouvant à certains égards se subdiviser en diverses parties, l’une administrée d’une manière & l’autre d’une autre, il peut résulter de ces trois formes combinées une multitude de formes mixtes, dont chacune est multipliable par toutes les formes simples.

On a de tout temps beaucoup disputé la meilleure forme de gouvernement, sans considérer que chacune est la meilleure en certains cas, & la pire en d’autres. Pour nous, si, dans les différents Etats, le nombre des magistrats*

[*On se souviendra que je n’entends parler ici que de magistrats suprêmes ou chefs de la nation, les autres n’étant que leurs substituts en telle ou telle partie.] doit