Page:Rousseau - Fragments inédits éd. Jansen 1882.djvu/37

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Cda est -il vrai? Si vous ne les avez pas écrits, vous feriez bien de les écrire.* (17) Et Duclos se fait entendre dès Paris le 24 février 1764: ^j’ai toujours désiré que vous fissiez des mémoires particuliers de votre vie; il me semble que vous les aviez commencés. Je trouve dans HéloUe et dans Emile des morceaux qui sont plus copiés qu’imités de la nature. Ce n’est pas ainsi qu’on imagine.* (18). «Pour songer aux mémoires de ma vie, lui répondit Rousseau, le 2 décembre 1764, il faut plus de tranquillité qu’on ne m’en laisse et que je n’en aurai probable- ment jamais; si je vis toutefois, je n’y renonce pas.i Mais >ils sont trop difficiles à faire sans compromettre personne, a (19)

»Car malheureusement, s’ouvre-t-il à Moultou le 29 janvier 1763, ’n’ayant pas toujours vécu seul, je ne saurais me peindre sans peindre beancoup d’autres gens; et je n’ai pas le droit d’être aussi sincère pour eux que pour moi, du moins avec le public et de leur vivant.» (10)

Ce sentiment délicat fut enfin étouffé par la publication du pamphlet diabolique de Voi.taire, intitulé ^Sentiment des Citoyenst, dans lequel on avait non seulement inséré les plus affreux mensonges, mais divulgué aussi des secrets que Rousseau avait versés dans le sein de ses plus intimes amis, ills travaillent beaucoup à me faciliter l’entreprise d’écrire ma vie*, déclare-t-il le 13 janvier 1765 à Duci.os; ... »il vient de paraître à Genève un libelle effrayante, pour lequel la dame d’Épinav à fourni des mémoires à sa manière, lesquels me mettent déjà fort à mon aise vis-à-vis d’elle et de ce qui l’entoure. Dieu me préserve toutefois de l’imiter, même en me défendajit’. mais sans révéler les secrets qu’elle m’a confiés, il m’en reste assez de ceux que je ne tiens pas d’elle pour la faire conn^tre autant qu’il est nécessaire en ce qui rapporte à moi. Elle ne me croit pas si bien instruit, mais puisqu’elle m’y force, elle apprendra quelque jour combien j’ai été discret. Je vous avoue cependant que j’fû peine encore à vaincre ma répugnance, et je prendrai du moins mes mesures pour que rien ne paraisse de mon vivant.t (2r)

C’est ainsi que Rousseau se décida à écrire son histoire, qu’il appelait ila plus grande entreprise de sa vie*. iL’ouvrage,’^ annonce-t-îl à Rey le r8 mars 1765, »est déjà commencé, et je vois à vue de pays que ce sera un ouvrage aussi considérable que singulier. Car jamais homme n’aura fait une entreprise semblable et ne l’aura exécutée comme je me propose de le faire ; j’ai de quoi, et l’abondance de mes matériaux m’étonne moi- même. Le recueil seul des lettres, mémoires et pièces justifi-

(7^ Streckeisen-Moultou. y.’^, Kouiseau si (tS) Streckeisen-Moulton. Itnd. I. 302. (19) Oeuvres eompl. Carreip, XI, 176. (ao) lUd. XI. 33. (zi) Ibid. XI. 198,