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cousins, qui lui firent le plus tendre accueil[1]. Il donna les conseils les plus sages à Yudhiṣṭhira. Il lui parla, nous le racontions précédemment, de Jarâsañdha comme d’un rival dont il fallait avant tout se débarrasser, ce qui n’était point facile.

« Le roi Jarâsañdha, lui dit-il, désireux d’offrir des sacrifices à l’aide des autres monarques du monde, honora par un ascétisme rigoureux, Mahâdeva, le magnanime époux d’Umâ et il vainquit les rois »[2].

Kṛṣṇa, c’est-à-dire Viṣṇu, recommande ici le culte de Çiva qu’il donne comme le plus puissant protecteur dont Yudhiṣṭhira puisse rechercher les bonnes grâces. Le trait méritait d’être noté.

Nous savons que le prince qui célébrait le Râjasûya se faisait assister de rois vassaux qui proclamaient sa suprématie et le saluaient cakravartin, empereur.

Tant que Jarâsañdha serait le protégé de Çiva, Yudhiṣṭhira ne pouvait prétendre à la monarchie absolue. Kṛṣṇa n’avait-il pas été lui-même contraint de fuir devant ce redoutable guerrier ?

« Nous aussi, ô grand roi, par crainte de Jarâsañdha nous avons abandonné Mathurâ[3] pour nous retirer à Dvâravatî »[4]).

Ainsi donc Kṛṣṇa avoue son infériorité vis-à-vis de Jarâsañdha, ou plutôt Viṣṇu se reconnaît moins puissant que Çiva, son émule. Mais qu’on y prenne garde, le poète, au fond viçnouïte, ne consentira pas à laisser longtemps son dieu favori dans cette situation diminuée. Bientôt

  1. Id. 43.
  2. XIV, 64, 65.
  3. Ville fondée par Çatrughna et capitale des Yadus avant Dvâravatî.
  4. Id. 67.