Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/236

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présentaient, grâce à leurs timons placés bout à bout, un champ d’expérience commode et facile pour les premières tentatives d’un équilibriste encore novice.

Armée d’une paire de ciseaux, d’une aiguille enfilée et des deux prospectus que Séil-kor avait conservés, Nina se mit au travail ; dans la première feuille elle tailla un toquet, et dans la seconde un loup orné de deux fils destinés au côté postérieur des oreilles.

La fraise exigeait une plus grande provision de papier ; dans un coin de la remise gisait, jeté là au rebut, un paquet de vieux numéros de la Nature, journal que Laubé recevait régulièrement et dans lequel il écrivait tous ses récits de voyage. Arrachant la couverture bleue d’un grand nombre de publications, Nina parvint à établir une élégante collerette de couleur unie, et bientôt, paré des trois articles soigneusement exécutés par l’adroite ouvrière, Séil-kor fit ses débuts dans la carrière funambulesque, en parcourant d’un bout à l’autre le chemin étroit et fragile fourni par les deux timons.

Encouragés par cette première réussite, les enfants voulurent copier le boléro du couple espagnol. Séil-kor déposa son déguisement de papier, et la danse commença, tout de suite échevelée et fiévreuse ; Nina surtout mettait une ardeur étrange dans sa mimique, frappant ses