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LE CENTURION

Eh ! bien, je voudrais savoir de vous si quelque chose en lui vous a déplu.

— Mais, Camilla, je l’ai à peine connu ; et malgré la bonne éducation et la distinction qu’il m’a paru avoir, je lui ai fait comprendre qu’aucune relation sociale n’était possible entre nous. Voilà tout.

— Mais pourquoi l’avez-vous ainsi éconduit ?

— Parce que je n’appartiens plus au monde, Camilla.

— Que voulez-vous dire ? Prétendez-vous arracher de votre cœur tout sentiment humain ?

— Non. Mais aucun amour humain ne prendre plus jamais possession de mon cœur.

— Et le Prophète ? Ne l’aimez-vous pas ?

— Oui, certes, mais cet amour n’a rien d’humain. Ce n’est pas assez dire que je l’aime. Je l’adore, Il est mon unique amour, Il est mon tout, Il est mon Dieu !

— Cet amour que vous avez pour Lui exclut donc tout autre amour ?

— Oui.

— Je ne pourrais donc pas l’aimer moi, et en même temps agréer les hommages de Caïus Oppius ?

— Pardon, Camilla. Ces deux amours ne sont pas incompatibles, parce qu’ils ne sont pas de même nature. Et si vous voulez entrer dans l’état du mariage, rien ne s’oppose à ce que vous aimiez le centurion de l’amour le plus tendre, et que vous aimiez aussi le Prophète de cet amour d’adoration qui n’est dû qu’à un Dieu.