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En conservant la forme de construction de cette charrue, & sans toucher à l’assemblage de ces pièces, on pourroit la rendre propre à cultiver toute sorte de terreins indifféremment ; il ne faudroit pour cela que travailler le sep, qui est d’une forme très-défectueuse, selon les principes de construction dont il a été parlé dans la deuxième section du deuxième Chapitre sur la construction des charrues : ce changement peu considérable, la rendroit propre à entamer toute espèce de terrein, au lieu que telle qu’elle est, il est très-difficile qu’on puisse l’employer dans les terres extrêmement fortes & compactes, parce que le talon du sep étant plus large que le soc, il doit éprouver des frottemens très-grands en dessous & latéralement, en proportion de la cohésion des particules de la terre & de leur ténacité.

Malgré ce défaut, elle est préférable, pour la culture d’un terrein léger, à la charrue à versoir, parce que le laboureur qui entame une pièce de terre, continue son labour du même côté, en ayant attention, lorsqu’il est au bout de la raie, de changer l’oreille de place, afin qu’elle renverse la terre dans la raie précédemment formée : de cette manière, il n’est point obligé, comme avec la charrue à versoir fixe, de labourer d’un côté, & d’aller ensuite tracer un autre sillon au côté opposé, pour revenir ensuite au premier. Il n’y a donc que le dernier sillon qui reste à vide ; ce qui est indispensable, à moins qu’on n’entame la pièce voisine pour le combler. Quant au second labour, on ne change pas la direction des raies, il sert d’enréageure, & on le remplit en traçant la première raie.

Section III.

De la Charrue à double-oreille.

La charrue à double oreille, dont on se sert en Anjou, & dans plusieurs autres provinces où l’on laboure les terres en billons, est plus ou moins grande, plus ou moins large, en divers endroits, selon la profondeur & la force des terres. Le sep, qui est semblable à celui des charrues à versoir, est armé à sa pointe d’un soc de fer à deux oreilles, tel qu’on le voit représenté par la Figure 13 de la Planche 3, ce qui est cause qu’on nomme cet instrument de labourage, une charrue à double oreille. Ce soc est plus ou moins large & fort, sa pointe plus ou moins longue, selon la qualité des terres pour lesquelles il est employé : assez ordinairement d’une oreille à l’autre, c’est-à-dire de A à B, il est plus large que le sep, afin qu’il ouvre un sillon plus large que le talon du sep, autrement il éprouveroit trop d’obstacles dans le manche. C’est dans sa douille C qu’on fait entrer de force la pointe du sep ; ce soc à double aile ou double oreille, est quelquefois accompagné d’un coutre de fer ; d’autres fois on n’en met point ; cela dépend de la qualité du terrein qu’on laboure : s’il est léger, le coutre est fort inutile, au contraire s’il est fort, & rempli de mauvaises herbes, il devient absolument nécessaire : pour le retenir, on y place une bande plate de fer qu’on appelle le coutriau, qui se termine par un bout en crochet qui entre dans un trou situé vers le milieu du soc ; l’autre bout de cette bande