Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la seconde pour les marrons d’une moindre grosseur ; la troisième se consomme dans la ville, mais les marrons de Loire sont toujours classés à part. La chaîne des montagnes qui partage la Bourgogne du nord au sud, fournit encore de très-bons marrons, & ici se terminent les bonnes productions, en ce genre, de cette seconde parallèle.

Commençant une troisième parallèle, on trouvera ceux des Pyrénées, ceux de Rodez, d’Auvergne, du Périgord, du Limosin, du Poitou, &c. & il faudra reprendre une quatrième parallèle pour avoir ceux de la Navarre, & en particulier les excellens marrons de la vallée de Baigorri.

D’après l’inspection des lieux cités, on voit que les pays élevés jusqu’à un certain point, fournissent seuls des marrons & des châtaignes de bonne qualité, & que cet arbre, qui brave les hivers, exige de temps à autre d’avoir des coups de soleil actifs, afin de passer alternativement pendant l’été, de la fraîcheur du matin & du soir, à la chaleur du jour, & ainsi tour à tour. C’est, je crois, la raison pour laquelle les châtaignes des environs de Paris & des plaines, n’ont jamais un goût relevé.


CHAPITRE IV.

Du semis de châtaignes.


Il y a deux espèces de semis. Le premier a pour objet la formation des taillis ou des forêts, & on l’appelle semis à demeure ; le second s’exécute en pépinières, d’où l’on tire les sujets, afin de les transporter ailleurs.

Plusieurs auteurs agronomes ont avancé que les petites châtaignes étoient aussi bonnes à semer que les grosses, pour produire de grands arbres. C’est une erreur qui tire à conséquence. Je ne crains pas d’avancer, au contraire, qu’on doit choisir les meilleures châtaignes & les plus grosses, & même que, dans la vallée de Baigorri, si les châtaignes ont été bien choisies, il est inutile, dans la suite, de greffer l’arbre. On ne manquera pas d’objecter la coutume ; mais il suffira de répondre : Faites deux semis dans le même terrein, de grosses & de petites châtaignes, & l’expérience démontrera l’abus de la coutume. On préfère le beau blé au blé de médiocre qualité, lorsqu’on veut ensemencer ses terres. Les pépiniéristes en arbres fruitiers conservent les noyaux des pêches les plus grosses, les pepins des plus belles poires, des plus belles pommes, le jardinier, les semences des melons, des choux, &c. les plus parfaites. Le châtaignier seul formeroit-il donc une classe à part ! Il est absurde de le penser. Les habitans des Pyrénées, & sur-tout de la vallée de Baigorri, choisissent les châtaignes une à une, & confient à la terre ce qu’ils ont de plus précieux en ce genre.

I. Des semis des taillis. Si le terrein est inculte, il sera convenable de couper toute espèce de broussailles, d’arracher les racines, de labourer profondément la terre, & par ce travail d’ensevelir les herbes. Cette opération doit se faire dans le temps à peu près que la majeure partie des plantes qui couvrent la surface du terrein est en pleine fleur, & l’on n’attendra pas que la fleur ait