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Coppet, de laquelle on tireroit au moins quatre mille pieds d’arbres capables de faire des quilles pour des frégates.

II. Outre les belles forêts des cantons de Zurich & de Schaffouse, il y a beaucoup de chênes dans les haies, dont le gland est rebuté par les cochons. Dans la haute Alsace, on y connoît un chêne de haie, qui ne vient jamais que petit & tortu, dont le gland est presqu’entièrement renfermé dans son calice, & est très-amer ; mais ces vilains arbres ont un bois dont les fibres sont croisées dans tous les sens comme celles des ormes tortillards ; (voyez leur origine indiquée au mot Buis) & dans beaucoup d’ouvrages, ce bois est préférable à celui des chênes ordinaires, comme étant plus dur. Plusieurs de ces chênes restent nains, d’autres s’élèvent assez pour faire de très-bonnes courbes pour les vaisseaux. Son extérieur peu agréable, a sans doute rebuté l’observateur : il seroit essentiel cependant d’examiner sur quelle espèce de sol il vient mieux, & le multiplier à cause du prix excessif des bois destinés aux courbes. On l’appelle, dans la haute Alsace, haye-rehen, ou kleiberchen ; n’est-ce pas celui décrit au No 6 ?

III. En Flandre, dans le Brabant, dans la Normandie, &c. on voit de superbes avenues de chênes, & des plantations de cet arbre disposées en quinconces. Les arbres isolés n’ont jamais une quille d’une aussi grande portée que celle des arbres des forêts ; ils gagnent en largeur, en extension de leurs branches, ce que les autres gagnent en hauteur. Ce sont les seuls arbres capables de fournir les excellentes courbes pour la marine, & qu’on ne peut trouver dans les forêts que sur les rives des bois.

IV. Dans la plaine de Sisteron dans la haute Provence, on voit des chênes espacés au milieu des champs. Ceux qui existent sont conservés, parce qu’il est défendu aux propriétaires de les abattre. On n’en plante plus dans ce pays, afin de ne pas être sujet à l’inspection de la marine de Toulon, qui envoie les marques. Le prix fixé pour ces sortes d’arbres est sans doute trop modique, puisqu’il fait renoncer à leur plantation & à leur culture.

V. Dans le Brabant, on fait des haies croisées avec les chênes. (Voyez le mot Haie où je donne la description de la manière de faire ces haies.)

VI. Le taussin est une espèce de chêne blanc qui fournit le meilleur tan dans la basse Navarre. On prétend que cette écorce seroit d’un grand produit pour la province, si les bois, où cet arbre est commun, n’étoient pas si mal exploités. Quoique cet arbre soit employé à être écorcé, on le laisse quelquefois élever, & alors il devient aussi haut que les autres chênes. Ce chêne pousse six semaines plus tard que le chêne commun, & conserve ses feuilles également six semaines plus tard. C’est un avantage, parce qu’il est moins endommagé par les animaux, que les autres chênes, ses bourgeons paroissant dans une saison où ils trouvent d’autres pâtures. Il donne moins de fruits que les autres espèces.

Le chêne arraya, nom en langue basque, ou encena en espagnol, est beaucoup moins commun dans la basse Navarre que le taussin. Est-ce le chêne décrit, No. 1 ? Il a la feuille un peu plus petite que le chêne