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du profit. L’agriculteur a des yeux diffère ns ; il en fait le plus grand cas, parce que ces plantes offrent une nourriture d’hiver précieuse au bétail.


Section V.

Des Choux non cultivés dans les jardins, mais destinés aux usages économiques.


Chou colza. La culture de cette plante est d’un grand produit dans le nord ; elle fournit la meilleure huile qu’on y puisse retirer des productions du sol. Dans les pays du centre du royaume, l’huile de noix supplée à celle du colza : aussi on le cultive peu. Cependant, depuis un certain nombre d’années, sa culture y prend faveur, & je ne désespère pas qu’avec le temps tous les noyers ne disparoissent. Rien de si casuel que la récolte des noyers, rien de plus sûr que celle du colza. L’huile de colza bien faite l’emporte, à mon avis, sur celle de noix : il est donc raisonnable de rendre aux grains, le terrein immense que le noyer couvre de son ombre. D’ailleurs la récolte en blé, qui suit celle du colza, est toujours excellente, parce que la racine de cette plante pivote & n’effrite, & n’appauvrit pas la superficie ni les six pouces de profondeur de terre dans laquelle la racine de cette plante s’enfonce. Cette culture mériteroit des encouragemens de la part de l’administration, afin d’avoir, pour la consommation intérieure du royaume, assez d’huile, sans être obligé de recourir à l’étranger. Ce que je dis ne peut pas s’étendre, jusqu’à un certain point, aux provinces méridionales, parce que la chaleur y est très-forte, & la pluie très-rare, à moins qu’il ne fut possible de détourner des eaux, & d’arroser les champs plantés en colza. Dans ce cas, il vaudrait beaucoup mieux les convertir en prairies, le produit seroit beaucoup plus considérable. Je vais donner une certaine étendue aux détails sur sa culture, à cause de son importance.

Le colza ne se plaît pas dans les terres légères, sablonneuses, caillouteuses, elles laissent trop facilement écouler l’eau ; la tige file, prend peu de consistance ; la graine est petite, son écorce coriace, & son amande est sèche. Cependant l’huile qu’on retire des grains de ce colza, est plus délicate. Dans un terrein trop gras, trop argileux, & qui retient l’eau, le colza jaunit promptement, y végète avec peine ; il y pousse avec lenteur une tige fatiguée, produit des siliques étiques, des grains petits, remplis d’eau surabondante de végétation, & ils contiennent peu d’huile. C’est donc une bonne terre végétale que le colza exige. Celle à froment lui convient, si son fond est d’un pied de profondeur. Il seroit ridicule de proposer de convertir nos terres à froment en terres à colza ; on verra bientôt que la culture de l’un ne nuit point à celle de l’autre.

I. Examen des manières de semer. Il y a deux méthodes de semer le colza. Dans les pays du nord, où cette culture est en si grande recommandation, on le sème en pépinière pour le replanter ensuite : dans l’intérieur du royaume, ou cette culture commence à prendre faveur, on le sème comme le grain ; sans doute qu’on ne la connoît pas assez par-