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dans la plante, & à se combiner en sucs qui soient propres à son accroissement.

XVI. Si les fluides affluoient sans cesse & dans les mêmes proportions, loin de porter la vie à la plante, ils la feroient périr par l’engorgement général de ses canaux : la nature prévient ce désordre de l’économie végétale.

XVII. La chaleur du jour fait monter la sève dans les plantes, y excite une forte transpiration, & par une abondante sécrétion, le végétal se débarrasse d’une fluidité aqueuse & superflue : une grande partie, & la partie la plus élaborée des principes huileux, salins & terreux, restent dans la plante. Si une cause quelconque suspend ou arrête cette sécrétion, il en résulte, pour le végétal comme pour l’animal, les plus grands désordres ; souvent il en périt.

XVIII. La fraîcheur de la nuit produit un effet opposé : la sève montée dans le tronc & dans les branches, descend alors vers les racines, & dès qu’elle commence à descendre, les feuilles absorbent, par leur partie inférieure, l’humidité répandue dans l’atmosphère, ainsi qu’une partie considérable de l’air fixe qu’il contient. C’est par ce mécanisme bien simple & bien merveilleux, que la nature purifie l’air que nous respirons.

XIX. C’est donc par une ascension & une descension continuelles de la sève, & sur-tout par ses sécrétions que la sève s’élabore ; que par les dépôts successifs des principes qui la composent, elle parvient à établir la croissance & le volume de la plante.

XX. Les principes terreux constituent plus particulièrement sa charpente ; les huileux sont les principes de l’odeur qu’elle répand, & de son ignition, à cause de l’air inflammable qu’ils contiennent ; les huileux & les salins combinés, les principes de la saveur ; enfin l’air fixe, le lien de toutes les parties. Plus un bois est léger, moins il renferme d’air fixe, & peut-être plus d’air inflammable ; tels sont les bois blancs.

XXI. On pourroit conclure de ce que je viens de dire que toutes les plantes devroient avoir la même odeur, la même saveur, puisqu’elles sont formées par les mêmes élémens ou principes constituans. La nature a deux moyens pour établir leur étonnante diversité. Le premier consiste dans les sécrétions ; telle plante laisse échapper moins d’eau par sa transpiration ; la carde poirée, par exemple : l’autre, plus d’eau, & retient plus de sel ; telles sont les plantes dont la fleur est en croix. Celle-ci retient & conserve plus d’huile ; tels sont l’oranger, le millepertuis, le gayac : la fraxinelle, la capucine, retiennent plus d’air inflammable, puisqu’il s’allume à l’approche de la flâme d’une bougie, &c. Les arbres ont plus de parties terreuses que les plantes ; & les plantes annuelles, moins que les biennes ; enfin, celles-ci, moins que les arbustes, les arbrisseaux & les arbres. Le second moyen est dans la semence. L’Auteur de tous les êtres a imprimé à chaque espèce sa saveur propre, & les loix d’après lesquelles elle doit végéter. Comme toute la plante, & le chêne même le plus élevé, est contenu en miniature dans le grain destiné à sa reproduction, il n’est donc pas étonnant que cette semence communique