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trouve dans la pratique, est de rencontrer des laboureurs qui veuillent s’accoutumer à observer le juste équilibre qu’elle demande dans son opération : toute la manœuvre dépendant de leur intelligence, plus encore de leur bonne volonté, il est certain qu’elle peut très-bien réussir, s’ils veulent prendre la peine de la bien gouverner.

TROISIÈME PARTIE.

CHAPITRE PREMIER.

Des Charrues composées, ou autrement appelées à avant-train.

La charrue à avant-train est préférable à toute autre, lorsque les circonstances permettent de l’employer. 1o. On peut la construire de manière qu’on n’ait pas besoin d’une si grande force de la part des chevaux, comme dans la charrue simple, parce que la ligne de direction n’étant point tirée de la pointe du soc, comme dans la charrue simple, mais de l’axe des roues de l’avant-train jusqu’aux épaules des chevaux, il n’y a pas de doute qu’en augmentant l’axe des roues jusqu’à un certain point, on aura l’avantage d’employer un levier plus long, qui sera la flèche, dont la longueur doit toujours être proportionnée à la hauteur des roues, contre les mêmes obstacles ; & de se servir de l’angle du tirage le plus favorable pour la force de l’attelage. La charrue à avant-train est donc la plus propre pour les labours difficiles des terres dures & fortes, ou pleines de racines & de pierres.

2o. Malgré l’addition de l’avant-train, qui, au premier coup d’œil, semble rendre cet instrument de labourage fort pesant, il fatigue moins les chevaux & le laboureur, que la charrue simple, parce que la flèche qui repose sur l’avant-train, est un régulateur fixe, absolument indépendant de l’attelage, qui ne permet au soc de s’enfoncer qu’à la profondeur donnée, laquelle ne peut plus varier, tant que la flèche demeure à la même hauteur sur l’avant-train. Par cette raison, le labour de cette charrue est plus régulier, plus uniforme que celui de la simple. Outre cela, la flèche étant posée sur l’avant-train, elle fait un seul levier avec les manches, & sert à enfoncer le soc quand on les presse ; au contraire, en les soulevant, on le fait sortir du sillon. Il n’en est pas ainsi de la charrue simple, elle entre plus dans la terre en soulevant les manches, & quand on les presse elle s’enfonce moins ; ce qui provient du point d’appui, qui, dans la charrue simple, est dans le talon & dans l’autre sur l’avant-train.

3o. La charrue à avant-train est beaucoup plus ferme que la charrue simple, parce que la profondeur du sillon est toujours réglée par l’avant-train sur lequel pose la flèche : d’ailleurs l’axe des roues étant le point d’appui de la flèche qui y est fixée solidement, l’arrière-train est bien moins sujet à verser à droite ou à gauche, que quand la flèche n’est pas fixée sur un point d’appui solide, tel que celui des charrues simples. Cette construction épargne les efforts extraordinaires qui sont quelquefois requis de la part de l’attelage, ainsi que du conducteur, en bien des circonstances, lorsqu’on laboure avec la charrue simple,