Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/211

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donc pas collées contre le mur. Les supports de ces tablettes seront multipliés & solides ; le poids du fruit est considérable & exige des précautions.

Le moment de cueillir le fruit d’hiver dépend du climat & de la saison ; car pour celui d’été, il vaut mieux le cueillir sur l’arbre, à son point de maturité ; il en est plus parfumé. (Voyez ce qui a été dit au mot Cueillette) J’ajouterai que, dans les pays froids, le fruit craint moins de rester plus long-temps sur les arbres, que dans les pays chauds, parce que leur maturité y est moins prochaine ; mais il faut prévenir les gelées.

Plusieurs particuliers, avant de fermer le fruit, l’amoncelant afin, disent-ils, de le faire suer, de connoître le mauvais fruit ; enfin, ils attendent que la masse ait acquis un certain degré de chaleur, & par conséquent de fermentation, Cette méthode est détestable. (Voyez ce qui a été dit au mot Châtaigne, que l’on traite ainsi). Après avoir cueilli le fruit aux heures & jours indiqués, il convient, autant qu’on le peut, de le laisser au soleil jusqu’à ce qu’il se couche, & de ne le porter au fruitier qu’après qu’il aura transpiré l’excédent de son eau de végétation. Dès que le fruit est renfermé, on le visite de temps à autre, afin d’enlever celui qui se gâte,

M. de la Bretonnerie, dans son École du Jardin fruitier, entre dans de très-bons détails, dont je vais donner le précis.

« Quelques personnes gardent des pommes des années entières, & en ont gardé même jusqu’à deux ans dans des caves ou souterrains, où l’air moins sec, moins subtil que celui du dehors, au lieu de pomper le suc des fruits, les entretient dans une fraîcheur naturelle, avec la précaution de ne pas les approcher trop près les unes des autres, & de les ranger sur des tablettes couvertes d’une mousse fine & tendre, qu’on a soin de battre au soleil à chaque nouveau remplacement ; chacune de ces pommes, placée à deux doigts de distance de sa voisine, s’enfonce doucement dans cette mousse, qui se relève entre deux ; au moyen de quoi celle qui vient à se gâter ne communique point son mal dans le voisinage ; il n’est pas besoin de paille ni de foin, ni de couvertures de lit, pour couvrir les fruits dans ces souterrains, comme dans les fruitiers ordinaires. »

» Si on est assez heureux pour avoir un caveau avec les qualités requises, sans y mettre des tablettes, ni revêtir les murs des planches, on y place une ou deux échelles doubles, plus ou moins, suivant son étendue, laissant des sentiers autour, & sur lesquelles, étant ouvertes, on pose des planches bordées de lattes, d’un échellon à un autre, & par étage, & de même d’une échelle à l’autre ; de sorte que la plus grande largeur des planches de chaque échelle se trouve en bas, pour les fruits communs & en plus grande quantité, & la moindre largeur en haut, pour les fruits les plus distingués : on a soin de les visiter souvent, pour ôter à mesure les fruits pourris, & emporter ceux qui sont mûrs… Quelques curieux, quand ils ont de magnifiques poires & de beaux raisins qu’ils veulent conserver pour des occasions, passent un fil au milieu de la queue, dont ils couvrent la plaie