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nana humilissima de Tournefort. Il diffère essentiellement des premiers par sa stature très-basse, par ses feuilles linéaires, par la multiplicité des fleurs qu’il produit pendant plusieurs mois de suite, & par son fruit, de la forme des grenades ordinaires, & gros comme une noisette.

II. De leur multiplication. Livré à lui-même, le grenadier n’offre en Espagne, en Italie & dans les provinces méridionales de France, qu’un buisson touffu par la multiplicité des tiges, & qui s’élève peu. Si, au contraire, on lui donne des soins, si on supprime les tiges inutiles, si on dégarnit par le bas celles qui restent, il s’élève alors en arbre de quinze à dix-huit pieds de hauteur, & souvent plus ; alors son bois est très-dur & fait d’excellens manches d’outils, &c.

1°. Des semis. Il est possible, par cette voie, de se procurer tout d’un coup un grand nombre de plants & même d’obtenir de jolies variétés ; mais ce moyen est très-lent ; cependant c’est le plus sûr & peut-être le seul pour acclimater dans le nord cette jolie espèce d’arbre. On choisira le meilleur des abris, ou on emploiera les châssis ; (voyez ce mot) une terre légère & très-substantielle convient dans ce cas. La prudence exige que les pépins ou grains soient mis en terre au moment qu’on les tire du fruit. Des irrigations au besoin sont les seuls secours que le semis demande, ainsi que le sarclage. À la seconde ou à la troisième année, suivant la force des pieds, on les lève de terre sans endommager aucune des racines, & on leur donne ensuite, en les replantant, un pied de distance.

2°. Des Boutures. Choisissez des pousses saines & vigoureuses, au bas desquelles vous laisserez un morceau du vieux bois ; plantez-les en terre meuble ; arrosez souvent & donnez quelques labours dans le courant de l’année. Elles reprennent alors très facilement.

3°. Des marcottes. Comme cet arbre pousse beaucoup de tiges des racines, on allonge ces tiges dans des fosses qu’on fait tout autour, on les courbe un peu, & le tout est recouvert d’un pied de terre ; mais il faut que le bout des tiges ou des branches vienne en dehors & sorte des fosses. Souvent ces boutures sont assez enracinées, après la première année, dans nos provinces du midi, si on a soin de les arroser. Si on a un vieux pied, on peut le couper entre deux terres, & il produira un grand nombre de tiges ; chargez-les de terre l’hiver suivant, & chaque tige deviendra une bouture. On peut encore couper le pied, éclater le collet des racines, & chaque brin des racines coupées formera un nouvel arbre.

III. De la conduite du grenadier. On le destine ou à former des haies, ou des espaliers, ou des arbres à tête, à la manière des orangers.

1°. Des Haies. Elles ne peuvent être d’une utilité réelle que dans les seuls pays méridionaux. Considéré sous ce point de vue, le grenadier est un arbrisseau précieux, puisque le prunelier ou prunier sauvage & l’aubépin (voyez ce mot) y réussissent très-mal, à cause des longues sécheresses. D’ailleurs, la dent meurtrière des troupeaux y dévore sans cesse les jeunes pousses, & l’arbuste, épuisé par des plaies renouvelées chaque