Aller au contenu

Page:Rugendas - Voyage pittoresque dans le Brésil, fascicule 3, trad Golbéry, 1827.djvu/7

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
( 23 )

S’il arrive qu’une bête de somme ait été froissée par la selle ou blessée de toute autre manière, on l’examine et on la panse ; on raffermit les fers, on raccommode les selles, on rassemble du bois pour cuire le souper, etc. Les tropeiros sont occupés de tout cela jusqu’au soir, et le plus souvent le voyageur lui-même est obligé de mettre la main à l’œuvre. Avant la nuit on réunit les bestiaux et on les nourrit de maïs, puis on les laisse errer de nouveau dans les environs pour y chercher eux-mêmes la pâture qu’ils aiment le mieux, ou bien on les conduit dans des lieux plus éloignés, si les fourrages y sont meilleurs. Ce qu’il y a de plus avantageux aux mulets, ce sont les broussailles des Capoeras nouvelles, c’est-à-dire aux endroits où la forêt primitive a été incendiée depuis peu. Souvent on a beaucoup de peine le lendemain matin pour rassembler les mulets ; et quand il en manque un ou plusieurs, il arrive parfois que les voyages sont suspendus des journées entières. Comme on peut bien le penser, la perte d’un mulet est fort désagréable dans les contrées où on ne peut le remplacer, par exemple dans les forêts primitives.

Pour ce qui regarde la nourriture et le soin du voyageur lui-même, la règle en général la plus sûre, c’est qu’il emporte avec lui tout ce dont il a besoin ou croit avoir besoin : il dépend donc de lui, c’est-à-dire de son plus ou moins de préjugés ou de mollesse, d’augmenter jusqu’à un certain point, et selon son goût, ses aises et ses jouissances ; mais comme tout ce qui dépasse le strict nécessaire occasionne de lourdes dépenses, il faut bien que le voyageur ordinaire se restreigne beaucoup. Les édifices que l’on a construits sur les routes les plus fréquentées pour recevoir les voyageurs, sont de diverses espèces. Il y a bien dans les bourgs et les villages considérables des maisons où l’on trouve de la place et du fourrage pour les bêtes, et peut-être une couche et des alimens grossiers pour le voyageur ; mais ces maisons sont rares : plus souvent on trouve un asile pour les bêtes et les hommes, mais sans nourriture ni fourrage. Le plus ordinairement le terme de la journée est ce qu’on appelle un Rancho, espèce d’échoppe ou de hangar, où les hommes et le bagage sont à l’abri de la pluie et parfois aussi du vent. Presque toujours ces Ranchos sont dans le voisinage de plantations (fazendas), où l’on trouve fréquemment des fourrages et quelques comestibles frais ; mais il faut bien se garder d’y compter. Parfois il y a, à côté du Rancho même, ce qu’on appelle une Venta, où l’on vend du maïs, de la farine de manioc, des fèves, du lard, des viandes desséchées et de la mauvaise eau-de-vie. Dans tous les cas il faut que le voyageur soit toujours muni de provisions pour quelques jours. En ce qui concerne les meubles du voyage, le hamac est, sous tous les rapports, préférable aux autres espèces de couches, non-seulement