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Page:Rugendas - Voyage pittoresque dans le Brésil, fascicule 3, trad Golbéry, 1827.djvu/8

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parce qu’il est plus léger, plus aisé à transporter et à dresser, mais parce que dans ces hamacs, qui souvent sont élevés de plusieurs pieds au-dessus du sol, le voyageur est mieux garanti contre les insectes et contre les autres animaux qui pourraient troubler son repos la nuit.

Quoique le nombre des animaux vraiment venimeux, et particulièrement des serpens, soit beaucoup plus petit qu’on ne le croit communément et que ne disent les Brésiliens eux-mêmes, il vaut mieux employer trop de précautions que de n’en pas prendre assez. Se coucher sur la terre est d’autant plus dangereux, que les serpens aiment la chaleur et se glissent volontiers sous la couverture du voyageur. Quand on ne les touche pas, il est vrai, ils ne font aucun mal ; mais si le voyageur, qui ne se doute pas de la présence d’un tel compagnon, le serre ou l’inquiète, il court risque d’en être mordu, et les morsures de plusieurs serpens, par exemple du serpent à sonnette (cascavella), et des giraraca, sont toutes presque infailliblement mortelles. Quant aux alimens, il faut toujours que le voyageur soit pourvu de maïs pour ses bêtes, et pour lui de fèves noires, de farine de maïs ou de manioc et de viande salée ou de lard. Il se peut que pendant des semaines entières il n’ait pas autre chose à manger, à moins qu’il ne soit un chasseur heureux, ou qu’il ne trouve à acheter çà et là de la viande fraîche ou de la volaille dans quelque fazenda : sur les routes fréquentées ces denrées sont de la plus grande cherté, et les colons ne consentent souvent qu’à grand’peine à céder quelque chose de leurs provisions. Néanmoins la conduite des colons dans les parties moins fréquentées est toute différente. Le voyageur y trouve presque toujours l’accueil le plus cordial et une abondante nourriture ; il est rare qu’on lui fasse payer autre chose que le fourrage des chevaux et des mulets. De la sorte, il arrive parfois que sur les routes les plus fréquentées du Brésil on éprouve plus de privations et de gêne que quand on s’écarte du chemin. Nous aurons à peine besoin de remarquer que dans un voyage en Brésil, comme dans toute autre contrée, il importe beaucoup que l’étranger s’accommode aux mœurs du pays, et qu’il ne repousse pas sans nécessité les opinions, les prétentions, les préjugés des habitans. Cette précaution, que la saine raison et l’usage du monde recommandent également, est d’autant plus nécessaire dans un pays où en général on n’aime pas les étrangers, et les Européens encore moins que les autres, où par différentes raisons on se méfie d’eux. Il est certain que les Brésiliens ne laisseront paraître leur méfiance et leur éloignement que fort rarement dans les relations ordinaires ; mais tôt ou tard, et souvent après un long espace de temps, l’étranger s’apercevra qu’on l’a simplement toléré, ou que sous main on travaillait