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NOTES

Mès orandroit quanqu’an terre ai.
Sanz retenir riens qui soit née,
Guerpuis sans nule demorée,
En l’onor Dieu, qui tot[1] cria,
Le siècle et tout quanqu’il i a,
Et le déable et l’acointence
Guerpis sanz nule demorance. »
Li bons péchierre à tant se drece ;
Tot en plorant mult tost s’adrece
Vers une église Nostre-Dame :
Si li commande cors et âme.
En l’église entre sanz demore :
Laienz gémist et laienz plore ;
Laienz se bat et laienz veille ;
Laienz fet-il tante merveille
N’est nus qui réciter le sache.
Ses cheveuz tret, ses cheveuz sache.
Son vis despièce et s’esgratine,
Son piz débat[2] et sa poitrine,
Et à terre souvant s’estant.
Théophilus à rien n’entent
Fors à prier la douce Dame
Qu’il daint avoir merci de s’âme.
« Mère, fet-il, au Roi du ciel,
Qui plus ies douce que miel[3],
Qui plus ies douce et savoreuse,
Plus debonaire et plus piteuse,
Et plus souef et plus bénigne,
Et plus très seinte et plus très digne
Que ne porroit langue retrère,
A bone fin me deigne traire,
Ha ! mère au Roy qui tot cria,
Ainz nus de cuer ne te pria
A cui tu féisses le sort[4].
Dame an cui toute doçorz sort,
Sacrée Virge debonère,
Ne sai que dire ne que fère
Se ta douçor ne me regarde.

  1. Ms. 2710. Var. Me.
  2. Ms. 6987. Var. Sa coupe bat.
  3. Ms. 2710. Var. De nul miel.
  4. Ms. 2710. Var. Cui ta douceurs féist le sort.