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ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

Et touz li mondes tot à fait
Chaucun jor, Dame, tant meffait
Que il fondroit el fonz d’abisme,
N’iert pénitance, et tu méisme
Qui le souztiens par ta prière.
Bele très douce Dame chière,
Se n’iert veraie pénitance,
Confession et repantance,
De mal en pis chascun iroit
Et touz li mondes périroit.
Des granz péchiez et des meffez
Que j’ai pensé et diz et fez,
Douce Dame, sui repantanz,
Dolenz, tristes et dementanz
Si durement com j’onques puis.
Fluns de doçor, fontaine et puis,
Mère et norrice au Savéor,
De cest repantant péchéor
Aies pitié, qui tant t’apele !
Tant ai veillié en ta chapele
Et tant jeuné et tant oré,
Et tant gémi et tant ploré,
Et tant me repant durement
Que je sai bien séurement,
S’ausi doce ies com tu seus estre,
Pitié te prengne de mon estre,
Et à ton Fil ma pès querras,
De nule rien ne l’ requerras,
Ce sai-ge bien tot sanz doutance,
Qu’il ne l’ face sanz demorance. »

La haute Dame glorieuse,
L’umble pucelle, la piteuse,
Cele qui de touz biens est mère[1],
La douce Virge sainte et digne,
La debonère, la bénigne,
Cele en qui sort toute pitiez,
Toute douçor, toute amitiez,
Cele qui est la droite adresce
Qui tous les péchéors adresce,

  1. Le Ms. 1672 Saint-Germain ne contient pas le vers qui rime avec celui-ci ; les Mss. 6987 et 2710 ne donnent même pas le premier.