Page:Ségur - Le mauvais génie.djvu/287

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— Pauvre garçon ! dit le maréchal des logis en lui serrant la main. Pauvre Bonard ! Si j’avais pu te reconnaître plus tôt, je t’aurais sauvé ; mais le poste était arrivé, t’avait empoigné… Il était trop tard.

frédéric.

Me sauver ! Mon Dieu ! Mais qu’ai-je donc fait, maréchal des logis ? Dites-le-moi, je vous en supplie.

le maréchal des logis.

Tu as porté la main sur moi. Tu as lutté contre moi !

frédéric.

Sur vous ? Sur vous, maréchal des logis, que j’aime, que je respecte ! Vous, mon supérieur ! Mais c’est le déshonneur, la mort ! »

Le maréchal des logis ne répondit pas.

frédéric, se tordant les mains.

Malheureux ! malheureux ! Qu’ai-je fait ? La mort, plutôt que le déshonneur ! Mon maréchal des logis, ayez pitié de moi, de mes pauvres parents ! C’est pour eux, pas pour moi… Et mon excellent colonel qui m’avait prévenu le matin que j’avais de mauvaises relations ! Et moi qui voulais lui obéir, qui ne devais plus les voir ! Ils m’ont demandé une dernière soirée, une soirée d’adieu. Et moi qui ne bois jamais, je me suis laissé entraîner par eux à boire des santés pour ceux que j’aime. Mon Dieu ! mon Dieu ! ayez pitié de moi, de mes pauvres parents !… Lever la main sur mon maréchal des logis !… mais c’est affreux, c’est horrible ! J’étais donc fou ! Oh ! malheureux, malheureux ! »