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LES VACANCES.

avaient rendue plus chère encore. Lucie était fort grandie et embellie, mais il lui trouvait le même visage.

« Je t’aurais reconnue entre mille, lui dit-il. Et moi, comment as-tu pu me reconnaître ?

LUCIE.

Mon bon père, vous n’êtes pas bien changé non plus. J’ai tant et si souvent pensé à vous ! C’est comme si vous étiez parti de la veille. »

Se souvenant tout à coup de sa mère :

« Ah ! ma pauvre mère ! Ne voilà-t-il pas que je l’oublie dans mon bonheur de vous revoir ! Vite, que je coure lui dire… »

Et Lucie allait s’élancer vers la maison blanche, mais son père lui saisit le bras, et la retenant fortement :

« Tu vas la tuer en lui apprenant mon retour sans ménagement. Ces messieurs y sont ; va voir si c’est bientôt fait et quand il me sera permis de serrer contre mon cœur ta mère, ma Lucie, ma chère femme, ma bonne et sainte femme, que j’ai bien pleurée, va. »

Lucie promit à son père d’être bien raisonnable, bien calme ; et courant de toutes ses forces vers la maison, elle y entra toute haletante, mais si joyeuse, si éclatante de bonheur, que sa mère la regarda avec surprise.